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Après Antonin Artaud et Sarah Kane, écrire la psychiatrie et le recours chimique à hauteur d’un face à face avec le psychiatre. Affirmer que vivre, vivre vraiment est aujourd’hui devenue une pathologie. Et puisqu’au travail et ailleurs la critique sociale est psychiatrisée, se psychiatriser davantage pour aller vers une nouvelle critique sociale. Ce texte n’est ni un poème, ni un essai ni une lettre, ni un pamphlet ou encore un monologue théâtral, sa forme est juste la seule possible pour tenter de faire preuve de pensée (et de riposte vaine, mais salvatrice), en usant d’humour et d’autodérision. C’est un refus qui dit oui, on ne fera pas la révolution sans éclats de rire. En sachant que la pensée de l’auteur a des angles morts qui ouvrent sur des questionnements plus larges que la seule question que l’on lui pose un peu trop : Quelle est la pathologie ? Lettre au recours chimique – extrait Et je suis devant des psys qui ignorent tout d’un processus de création Plusieurs fois ce sont mes excès d’implication en écriture Qui m’ont mis dedans La jubilation de l’écriture La convocation du passé Et le comment être post-moderne Après les post-modernes Et la recherche formelle Ou la recherche du feu Et le pourquoi écrire si on n’invente pas une langue ou/et une forme Une respiration calée sur le flux Et la recherche d’angoisses et d’états-limites pour nourrir le texte Le relier à l’inconscient et au chaos Jeu avec la culpabilité d’exploiter l’autobiographie De faire de personnes existantes des personnages Sans parler de mon impudeur L’accès de panique quand arrive la fin du texte Les descentes de lacets de montagne avec pas de frein sur le vélo Des relectures hypnotiques avec le logiciel d’anagrammes Des lectures lacanoïdes du texte Ou quand le signe et l’interprétation deviennent la maladie elle-même Se relever la nuit Art de l’euphémisme Essayer de s’endormir et allumer la lumière 20 fois 50 fois 100 fois Voilà c’est ça Le processus d’écriture qui empêche de dormir Comme si j’allais trouver du meilleur matériau Dans les affres de l’insomnie Et des cogitations incessantes qui tournent autour du texte et du langage De la pensée qui arrive en tel flux continu qu’il est impossible de dormir Maladie du travail de l’écrivain trop impliqué Impossible de dormir Une nuit Deux nuits 72 heures sans sommeil Aller au travail au radar Et au retour ne pas dormir Écrire des notes sur un carnet Lâcher deux pages sur Word Ou dix Gros avatar de merde quand tu chies sur mon monde de création Quand tu ne veux pas en entendre parler De ça et des 100 films réalisés en 2018 Dis-toi bien qu’il n’y a pas un Toféno social Avec qui tu parles cinéma ou politique Ma vie est vouée à la littérature Je suis cet homme-là Si tu veux en voir un autre Trouve-toi Un autre pote Un autre patient Un autre camarade Un autre frère Ce n’est pas être autocentré Être égocentré Rater aux yeux de mes juges la transmutation du Je Sublimement Et refuser le réel D’un monde qui ne soit pas création Et ma vie vive est une création Et on me demande chaque jour de redescendre à hauteur De ceux qui vivotent Même si vivoter Au regard d’où ils se traînent Vivoter à côté, c’est vivre dans les nuages Dois être votre premier patient client à venir avec mon matos de pêche Je vous l’ai dit : j’aime la Loire Et pour vivre la Loire On peut marcher le long des berges Sortir une barque, une gabare, un canoë ou un kayak Pour vivre la Loire on peut pêcher Ou chasser Ou nager Ou y faire l’amour Et si j’étais entré avec mon filet à appelants canards Plutôt qu’avec ma canne à lancer Oui avec une housse de fusil sur l’épaule Peut-être auriez-vous été un poil plus attentif Peut-être auriez-vous mieux écouté Un peu mieux considéré ma présence devant vous Surtout si par jeu j’avais joué lors de mon monologue Joué comme on joue avec une boule anti-stress Avec des cartouches de calibre 12