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Les divisions de la joie, n° 3, mars 2016, 3 €, à commander au 15 rue Myrha, 75018 Paris. Dans cette jeune et mince revue, la joie (dont la meilleure définition pour moi demeure celle de Spinoza, c’est-à-dire le passage d’une moindre à une plus grande perfection) est au moins divisée en trois contributions : celles de Luc Bénazet1 et Victoria Xardel2 (qui animent cette micro-entreprise) et celle d’Elinora Leger. En 4ème de couverture, Luc Bénazet évoque les rapports entre « les paroles » et les mouvements qu’elles sont susceptibles d’engendrer – ce qui, pour ma part, me rappelle cette fameuse phrase d’Ossip Mandelstam : « Ce qui distingue la poésie de la parole machinale, c’est que la poésie justement nous réveille, nous secoue en plein milieu du mot. »3 ; ce qui est loin d’être toujours le cas, bien entendu : « Les paroles sont ordonnées. À la place du mouvement dont elles sont privées, vient le cadavre qui ne se défait pas » – ce qui, ce coup-ci, me remet en mémoire ces mots de Nathalie Quintane : « Quand on pense qu’on cherche une langue vivante. »4 Luc B. donne également deux exemples actuels de ce qu’il nomme « un discours de capture » : « On est chez nous ! Arabi fora ! Il faut les tuer ! » et « Ils bafouent l’âme française. » et l’on voit donc qu’il y en aurait beaucoup d’autres, hélas. De telles préoccupations, à mi-chemin entre littérature et politique, entrent indéniablement en résonance avec chaque tiers (puisque division il y a) de la revue : 1 / 3 : « Aussi, les paroles conquièrent l’égalité communautaire par la division. Elles ne se rapportent pas aux saisons, non plus Aux formes de gouvernement. » (L.B., Journal des paroles) 2 / 3 : « Soyez précis. Il n’y a personne à sauver. Le mécanisme existe encore, mais les fêtes n’ont plus lieu. Parler d’expérience eût été excessif. Il faudrait tuer cette femme qui vit dans le langage. » (V. X., La contamination) 3 / 3 : « Nos / Futurs // Nicht wieder / Vichy / Ni guerre d’Algérie / Nique / La République / Ses Guerres / Ses Terroristes // Prisonniers des gouttes // Everything will be ok / in the end, / if it’s not ok, it is not / the end.» (E. L., Relevé des textes APPARAISSANT SUR LES MURS) Et c’est au lecteur de faire le reste. 1 Dernier livre paru : Annonce (avec Benoît Casas), éditions héros-limite, 2015. 2 Dernier livre paru : Méthode, Éric Pesty éditeur, 2012. 3 Entretien sur Dante, éditions La Dogana, 2011. 4 Formage, éditions POL, 2003.
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